Pour les non-amateurs d'art
Dans le colis du Victorian Christmas Swap, Goelen avait glissé parmi tant d'autres un tout petit livre d'un de mes auteurs fétiches (bah oui, j'aime bien celui qui fut la rebellitude incarnée pour son époque), Le Déclin du Mensonge d'Oscar Wilde.
Je l'ai commencé dans le bus en partance pour le centre de Paris, et, malgré son nombre de pages abordable (70, j'essaie par tous les moyens vicieux et mauvais joueurs de faire baisser ma PAL), j'ai eu beaucoup de mal à rentrer dedans. Ce n'était pas dû au style d'écriture wildesque, mais plutôt au style de discussion d'une des passagère du dit transport en commun.
Je tiens à vous avouer que j'aime voyager en bus : si je le prends depuis son terminus, il y a de fortes chances pour que je trouve une place assise au fond (des réminiscences de l'école, je suppose) ; s'il n'est pas bondé, que des effluves nauséabondes ne me remontent pas jusqu'aux narines (prenez le RER un soir vers 18H30 et vous comprendrez...). Et la vue... ah ! quel plaisir de pouvoir, ne serait-ce que quelques instants, admirer la beauté architecturale de Paris .
Ce jour-là (en fait, c'était hier), je prends une place dans l'avant-dernière rangée. Je commence à lire le premier paragraphe quand j'entends la voix d'une jeune femme parler sans discontinuer. Je vous assure, c'est à se demander comment cette fille, a priori fière des deux ans et demi de théâtre qu'elle a pu faire à l'école (ceux-là mêmes qui ont dû lui apprendre à parler fort et a forcer les gens les plus sérieux et les moins curieux à écouter son discours ininterrompu) faisait pour respirer tout en aimant s'écouter parler.
Bref, tout ça pour vous dire qu'à la critique extrêmement intéressante de l'art par Oscar Wilde se mêlait une critique qui l'était beaucoup moins sur les avantages et les inconvénients d'avoir le tout dernier vibrophone à la mode.
J'ai dû attendre la descente de cette nana pour pouvoir enfin comprendre le propos de l'auteur.
Ce petit livre pourrait se résumer en une seule phrase : "nul artiste ne voit les choses telles qu'elles sont en réalité. S'il les voyait ainsi, il cesserait d'être un artiste."
Dans un dialogue entre les deux personnages de cet essai, il aborde divers sujets (la politique, le journalisme, la littérature, la peinture...) de manière impertinente, inscrivant dans ces paroles des attaques systématiques envers les "porte-paroles" de son monde.
Les journalistes, les politiciens, les artistes proclament la vérité que le peuple veut entendre. Ils subliment le monde réel, gomment ce qui pourrait passer pour une imperfection, celle qui rendrait juste ce que l'on perçoit.
Un petit exemple de la rhétorique totalement impertinente d'Oscar Wilde :
"Nous demandons à la littérature la distinction, le charme, la beauté et le pouvoir imaginatif. Nous n'avons nul besoin d'être horripilés et écoeurés par le récit des faits et gestes des basses classes"
"La révélation finale est que le Mensonge, le récit de belles choses fausses, et le but même de l'art."
Tout ça pour vous dire que ce livre m'a bien plu tant par son côté très Victorien, que par ses propos de temps en temps volontairement "choquants".